Mardi 5 novembre, des professionnel.le.s du numérique responsable ont présenté, lors de notre afterwork, leur métier et leur parcours hétéroclite, partageant le même point de vue : il faut changer nos pratiques du numérique.
Ils et elles sont venu.e.s partager devant une vingtaine d’étudiant.e.s et de jeunes diplômé.e.s leur vision du numérique, leur choix de carrière professionnelle et les perspectives d’avenir des métiers qui touchent au numérique responsable :
- Anne-Laure Michel, se forme au numérique en autodidacte, après un master en médiation de la culture et des patrimoines et devient cheffe de projet numérique chez Animafac.
- Ferdinand Richter, ancien joueur de rugby, il est aujourd’hui manager France d’Ecosia.
- Saliha Mariet, longtemps sensibilisée à la cause environnementale, elle est consultante RSE avant de devenir directrice des opérations pour le label Lucie et le label Numérique Responsable.
- Bela Loto, anciennement ingénieure du son, elle est aujourd’hui co-fondatrice/coordinatrice de Point de M.I.R (Maison de l’Informatique Responsable).
Chacun.e sensibilisé.e. à sa manière, après avoir pris conscience des enjeux liés à Internet, nos invité.e.s ont pris l’initiative d’agir concrètement dans leur métier, en empruntant la voie du numérique responsable.
La responsabilité (du) numérique
Un numérique « plus responsable » comme l’a souligné Bela Loto, car les deux sont incompatibles. Il s’agit de limiter son impact environnemental, loin d’être virtuel, en intégrant les défis territoriaux et sociaux.
L’électronique est l’une des industries les plus polluantes, car elle dépend inévitablement des ressources non renouvelables, que sont l’énergie et les métaux. D’une part, le cycle de vie de la machine est très impactant (169 kg de CO2 émis sur l’ensemble de son cycle de vie) ; de l’autre, contrairement à l’image illusoire d’un numérique neutre, celui-ci représente un coût énergétique qui, lui, est bien réel. Il faut imaginer des milliers de serveurs, de câbles, d’équipements informatiques emmagasinés dans des locaux, qui consomment beaucoup d’énergie.
« Paradoxalement, plus on dématérialise, plus on utilise de matières. Plus on miniaturise et complexifie les composants, plus on alourdit leur impact sur l’environnement. » (La face cachée du numérique).
Il ne s’agit pas de se priver complètement de ce qu’apporte Internet, mais bien de prendre conscience des enjeux qui se cachent derrière le visionnage d’une vidéo streaming. La clé : apprendre à modérer sa consommation, privilégier une certaine “sobriété” numérique. Cela demande par exemple de faire l’effort de réduire ses pratiques individuelles sur des appareils utilisant la 4G, très énergivore. Le numérique ne devient pas responsable, c’est donc à ses utilisateurs de se responsabiliser.
Le numérique à bon escient
Les mutations numériques ont amené le monde du travail à s’adapter à des technologies nouvelles, aujourd’hui indispensables dans n’importe quelle branche professionnelle. De l’industrie, la mobilité, la communication à l’environnement : les usages sont multiples et se développent chaque jour. Mais pour nos intervenant.e.s conscient.e.s des enjeux, travailler dans le secteur du numérique nécessite de surveiller ces gestes au quotidien. Limiter sa consommation de produits électroniques (tablette, smartphone, ordinateur portable …), acheter reconditionné, éviter le streaming, vider le cash de son ordinateur, stocker ses documents sur un bon vieux disque dur et non sur un “cloud”, sont autant de gestes qui participent à la réduction des impacts sur l’environnement.
Travailler dans le numérique responsable consiste également à le mettre en œuvre dans toutes les strates de la société, à faire en sorte de banaliser son utilisation. Permettant d’atteindre un large public, le numérique apparaît ainsi comme un formidable outil de communication. Pour le manager France d’Ecosia, les réseaux sociaux permettent le changement d’échelle de la portée d’une information et donc de sensibiliser un maximum d’individus. Bela Loto privilégie, quant à elle, les réseaux “physiques”, c’est-à-dire le contact direct, en organisant des ateliers et formations qu’elle anime. De son point de vue, le recours au numérique se limite au stricte minimum. Hormis des opérations de sensibilisation, Point de MIR s’engage également dans la lutte contre l’obsolescence et le gaspillage, grâce à des opérations de collecte des appareils électroniques, par la suite re-commercialisés. Avec les labels “Lucie” et “Numérique responsable”, Saliha Mariet souhaite redonner du sens au monde de l’entreprise et valoriser l’engagement des organisations dans une démarche responsable, qui inclut le respect des hommes et de la planète. Ceci touchant, bien-sûr, à la notion de numérique responsable. Enfin, Anne-Laure Michel, en charge des projets numériques de la structure Animafac, participe elle aussi à des opérations de sensibilisation qui ciblent une population étudiante. Passionnée par les nouvelles technologies, elle s’intéresse aux alternatives des outils “web” traditionnels, comme les logiciels libres ou l’éco-construction de sites Internet. Certaines associations peuvent aider d’autres associations ou ONG à l’éco-construction et leur apporter des solutions numériques, comme WebAssoc, Solidatech.
Un marché dédié au numérique responsable
Si le numérique s’est intégré dans tous les secteurs d’activité, l’approche responsable du numérique se développe, mais elle est encore peu exploitée. Cet ensemble de connaissances et de compétences précises, souvent ignorées du grand public, constitue un atout majeur pour se démarquer sur le marché du travail. Notamment auprès d’entreprises ayant signé une charte sur le numérique responsable, ce qui simplifie la démarche.
Le secteur en expansion ouvre des possibilités à des candidat.e.s motivé.e.s. et conscient.e.s de ce qu’implique de travailler dans le numérique, comme passer beaucoup de temps devant un écran. Mais si l’attirance pour les nouvelles technologies y est, envisager une carrière dans une branche « responsable », c’est aussi donner du sens à ce que l’on fait et allier travail avec ses convictions. Ne reste plus qu’à passer l’étape cruciale de l’entretien pour un stage ou un emploi … Ferdinand Richter souligne l’importance de montrer à son/sa futur.e employeur.se ses motivations profondes et d’arriver lors de l’entretien avec un réel projet d’avenir. On ne cherche pas un stage uniquement pour trouver un stage à tout prix. Il faut donc se creuser un petit peu les méninges et se poser les bonnes questions sur les raisons qui justifient ce choix. Se lancer dans ce domaine encore peu connu nécessite de bien connaitre son sujet et de devenir un.e véritable expert.e., en s’auto-formant et en allant à la rencontre de ceux.celles qui s’y connaissent. Enfin, la part des femmes dans les métiers du numérique est encore trop ténue. « Peu de femmes exercent le métier de cheffe de projet numérique », explique Anne-Laure Michel qui souhaiterait voir le milieu se féminiser avec la prochaine génération.
Pour aller plus loin :
- Guides de l’ADEME : « Écoresponsable au bureau« , « Les éco-gestes informatiques au quotidien » de Bela Loto Hiffler.
- L’écoconception des sites web et la communication digitale : Green Code Lab, Greenit