J’ai testé pour vous : le Wwoofing en Irlande

A l’automne 2017, Benoît, notre volontaire chargé d’animation web ici au REFEDD, a réalisé un roadtrip en République d’Irlande en levant le pouce. Cette aventure a été parsemée de volontariat en Wwoofing. Il vous raconte tout ça et vous donne des astuces pour faire de vous le.la meilleur.e woofeur.euse !

 

 

Mais tout d’abord, le wwoofing, késako ?

Tiré de l’anglais, le Word-Wide Opportunities on Organic Farms est un réseau mondial dont les premiers essais remontent aux années 70 près de Londres. La volonté de base était que les citadin.e.s aient accès « facilement » à des travaux itinérants dans des fermes. Au fil des décennies, le mouvement s’est extrêmement développé passant de simples week-ends de travail ressourçant à un véritable mode de vie pour certains. Aujourd’hui on compte plus d’une centaine de pays engagés à travers le monde, représentant plusieurs milliers d’hôtes prêts à échanger.

L’avantage de ce procédé, c’est qu’il n’y a pas forcément besoin d’être un.e expert.e en agriculture biologique pour pouvoir y prétendre (sauf rares cas qui spécifient dans l’annonce des compétences particulières).

Le principe est simple, travailler dans une ferme pendant plusieurs semaines, généralement 4 ou 5 heures par jour (sauf week-ends) et d’être nourri.e/logé.e/blanchi.e en échange. Les modalités de temps de travail et autres détails sont à définir au préalable entre l’hôte et le «wwoofer». Les domaines sont extrêmement vastes allant de l’apiculture, des chantiers éco-construction en passant par du maraichage classique ou la création de fromages.

Le maître-mot c’est le partage. D’autant plus lorsqu’on se lance comme je l’ai fait, à l’étranger. Débarquer dans un nouveau pays avec un anglais approximatif et aucunes notions agricoles, c’était un pari assez risqué…

«living, learning, sharing organic lifestyles» (Vivre, apprendre et partager un mode de vie écologique)

 

Se découvrir soi

Je tiens tout d’abord à préciser que mon expérience n’est pas représentative pour vous dresser un portrait totalement partial de ce qu’est le wwoofing, ce ne sont qu’au mieux les grandes lignes. Chaque expérience est différente, suivant la sensibilité et les attentes de chacun.

Instant émotion (et contre-jour) aux très connues “cliffs of Moher” sur la côte du comté de Clare

Contrairement à L’Ecosse, je ne me suis pas trop senti déstabilisé par l’accent du pays. Arrivé à la fin de l’automne, il restait peu de travail à effectuer autour de la terre, c’est pourquoi je me suis principalement retrouvé chez des gens adorables en campagne près du fameux Connemara.

J’ai passé plusieurs semaines à entretenir des grands jardins notamment sur une propriété qui louait des chambres d’hôtes en haute saison. Tondre la pelouse, débroussaillage, taillage, couper du bois, replanter partiellement. Bon, techniquement j’arrivais à peu prêt à suivre. Mais j’ai également compris la différence entre un jardin classique « à la française » et celui paysager « à l’anglaise ». Capacité d’adaptation oblige. J’ai du prendre le contre-pied d’une esthétique totalement différente, bien plus proche de la Comté des hobbits de Tolkien que de celle de la cour de Versailles.

J’ai également réussi à recréer une mare pour la faune environnante en creusant un trou assez profond, en superposant des couches de bâches, en remplissant la surface en eau et en jouant à Tetris avec les petits rochers pour faire la déco.

Mon grand ami Tika le labrador, et moi en plein chantier.

 

Et quel bien cela m’a fait. La plupart du temps perdu au milieu de nulle part. Quasiment sans accès à internet. Vivre au rythme du soleil. Sans stress et choyé par mes hôtes. J’ai réussi à bien progresser en fluidité anglaise, à être invité aux repas de famille, quand ce n’est pas au pub pour une bonne Guinness. J’y ai senti que le Wwoofing était plus pour eux le moyen d’avoir de la compagnie, la plupart était cinquantenaire ou plus âgés encore. Nous avons partagés des moments vraiment forts.

Je ne garde de ce périple qu’une seule expérience écourtée, malheureusement la dernière. L’hôte n’avait vraiment pas joué le jeu, si je puis dire, par rapport aux modalités présentées sur l’annonce.

Cet homme avait décidé de changer radicalement de vie, en passant de la city londonienne au rêve d’acheter des hectares de terre au fin fond du Kerry (sud-ouest du pays). Seulement il n’avait sans doute pas réalisé la tache qui l’attendait, seul (ou presque) face à une propriété ressemblant à une décharge avec pour seule habitation une cabane du début du siècle dernier. Arrivé début décembre, avec aucun chemin à notre disposition même devant la petite maisonnette, et une pluie diluvienne tous les jours, sans isolation, avec les mures suintant, je décidais finalement de quitter le navire après seulement 3 jours. Pour cette dernière expérience, il aurait fallu appeler des gens qualifiés en commençant par retaper l’habitation avant d’entreprendre des projets quelconques sur les terres. J’ai tenté de lui expliquer cela avant de partir, je ne sais pas ce qu’est devenu cet homme. J’espère qu’il arrivera malgré tout à s’en sortir et à faire plus confiance aux irlandais locaux, car la solitude avait l’air de le ronger…

Encore un autre super copain dans une auberge de jeunesse (vous noterez la polaire de bon goût)

 

J’ai donc décidé de vous récapituler mes conseils perso (et erreurs que j’essayerai de ne pas refaire à l’avenir) :

  • Suivant les destinations prisées mais en général vu la popularité du Wwoofing depuis quelques années, penser à s’y prendre à l’avance pour « réserver » vos dates chez un.e hôte. Et quand je dis à l’avance, j’entends 6 mois à l’avance voir parfois plus pour les adresses très réputées… Et oui, côté impro on repassera mais le concept étant victime de son succès, il faut bien gérer l’organisation si l’on veut espérer une expérience de qualité. Enfin, les hôtes ne sont pas des machines, ils.elles ont aussi le droit à des périodes de « pause ». A bon entendeur !
  • Suivant les missions où vous postulez, penser à vous renseigner sur les conditions météorologiques avant d’effectuer vos cherches. J’entends par là, que l’hiver est généralement assez peu actif dans l’agriculture (c’est la raison pour laquelle j’ai eu du mal à trouver beaucoup d’opportunités en basse saison…)
  • Ça paraît aller de soi, mais on n’est jamais à l’abri d’une mauvaise surprise. Essayez le plus possible de postuler à des annonces avec beaucoup de photos, variés et qui « semblent » représenter la propriété et ses habitant.e.s. Plus vous aurez d’avis sur l’hôte, meilleure sera la garantie.
  • Cela dépend de vos moyens mais vous pouvez aussi amener un petit présent à votre hôte, cela fait partir la relation de bon pied et pas besoin de se ruiner, une bonne bouteille à 5 euros ou des petits gâteaux de chez vous (si vous n’enchaînez pas les destinations).
  • Le prix des cotisation pour avoir accès pendant 1 an au site de votre destination varie selon les pays. À 25€ en France, il peut monter jusqu’à 70$ en Australie. Si vous partez pour seulement 2 semaines et que vous savez que vous ne reviendrez pas dans ce pays dans l’année, réfléchissez et ne regrettez pas ce petit investissement.  (Comptez environ quelques –dizaines- d’euros de plus si vous êtes deux).
  • Il existe des alternatives aux Wwoofing car ce dernier reste axé agriculture. Avec le même principe de travail contre gîte et couvert il existe notamment : Helpx ou Work Away suivant les pays, et ces sites fonctionnent avec des métiers dans des domaines plus variés.

 

Ma conclusion, c’est que je ne peux que vous encourager à expérimenter ce mode d’échange et de voyage. Malgré certaines polémiques qui peuvent exister et sont malheureusement bien réelles sur des cas d’esclavage (le mot est un peu fort) camouflé, la plupart des hôtes et volontaires partent avec une démarche extrêmement positive. Si vous êtes bien renseigné et organisé en amont, il y a peu de chance de mal tomber. Mais… on ne peut jamais garantir cette sécurité lorsque l’on part à l’aventure, c’est généralement cette excitation qui nous pousse à partir. Un accomplissement personnel que ne pourra pas vous apprendre les bancs de la fac. Croyez en vos rêves. Alors bon vent, vers votre liberté !

 

Article rédigé par Benoît Le Guillou, chargé d’animation web au REFEDD.

Sources :