Lors des intersessions, plusieurs sujets ont été soulevés. Dans cet article nous nous concentrerons sur la question des forêts et de l’agroécologie. En effet, leur prise en compte dans la lutte contre le réchauffement climatique est essentielle à bien des égards.
Les forêts
La question des forêts a dès 1992 fait l’objet de désaccords. Pour cause, une forêt qui se trouve sur le territoire d’un « État A » a des intérêts écologiques qui ne se limitent pas à ce seul État. C’est la raison pour laquelle certain.e.s affirment que les forêts représentent un intérêt patrimonial pour l’ensemble de l’humanité.
Lors du premier sommet de la Terre qui a eu lieu à Rio (1992), l’objet du contenu d’un texte international sur ces dernières faisait débat et opposait déjà les pays industrialisés aux pays en développement. Les premier.e.s étaient « partisans d’un texte sur les forêts tropicales ombrophiles et les pays en développement estimant que les forêts des régions tempérées et boréales devaient également être couvertes par un texte global. » (Raphaël Romi)
Finalement, est née de ces débats non pas un texte à valeur juridiquement contraignante, mais une Déclaration de principes sur la gestion écologiquement viable de tous les types de forêts. La concrétisation juridique d’un instrument contraignant dans le domaine est complexe. En effet, depuis plusieurs années les forêts font l’objet de travaux lors de conférences des parties que ce soit pour la Convention sur la diversité biologique ou pour la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques.
Adopté en 2015, l’Accord de Paris s’est saisi de la question. En effet, ce n’est pas parce qu’il n’est pas divisé en thématiques qu’il ne possède pas d’article spécifique sur les forêts. Ces articles sont précieux car ont pu être évoqués dans plusieurs négociations lors des intersessions.
Article 5 de l’Accord de Paris
Par exemple, l’article 5 de l’Accord de Paris se réfère aux puits de carbone, c’est-à-dire à des endroits naturels stockant le carbone atmosphérique. Parmi ces puits de carbone, on retrouve principalement les océans, les tourbières et les forêts. Ces derniers sont convoités car constituent un moyen important et simple d’abaisser le bilan carbone d’un pays. A titre d’exemple, les forêts tropicales absorberaient 15% des émissions de carbone liées aux activités humaines. Leur prise en compte dans les bilans est controversée, tout comme celle des océans. Effectivement, si les océans deviennent un moyen d’abaisser le bilan carbone d’un Etat partie, ces derniers pourraient les utiliser comme prétexte pour limiter leur réduction d’émissions de gaz à effet de serre.
Article 6 de l’Accord de Paris
La question des forêts était également appréhendée sous l’égide de l’article 6 de l’Accord de Paris. Ce dernier établit un « mécanisme pour contribuer à l’atténuation des émissions de gaz à effet de serre et promouvoir le développement durable ». En d’autres termes, il est question des marchés carbones.
Se posent les mêmes problèmes que ceux présents pour l’article 5. Comment comptabiliser les bénéfices ? Et comment s’assurer que ces derniers ne soient pas comptés à la fois dans l’article 5, pour baisser le bilan des émissions nationales, mais également utilisés pour vendre des crédits carbones ?
Pour vérifier et clarifier tout cela, la transparence était un sujet particulièrement discuté pendant ces intersessions.
Le concept d’agroécologie
Il est scientifiquement établi que l’agriculture est une cause non négligeable du réchauffement climatique. Selon Reporterre, elle constituerait même aujourd’hui un quart des émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial. Face à ce constat et aux autres problématiques générées par certains modes d’agriculture intensive, des voix se sont élevées partout dans le monde. Il peut notamment être fait référence à l’ouvrage écrit par Rachel Carson en 1962 intitulé Printemps Silencieux qui a permis l’interdiction aux Etats-Unis d’un certain nombre de pesticides.
Face à ces constats, que faire ? Des modes d’agriculture intermédiaire sont apparus comme étant la solution, parmi lesquels figure l’agroécologie.
Mais, l’agroécologie c’est quoi ?
L’agroécologie peut être définie comme « une façon de concevoir des systèmes de production qui s’appuient sur les fonctionnalités offertes par les écosystèmes. »
Ce concept, objet de nombreux débats, était présent sur les tables de négociations à Bonn. Défendu notamment par l’Union Européenne, le terme «agroécologie » n’a pas été retranscrit comme tel dans le texte final. Seules des notions sous-jacentes y sont présentes.
Ceci s’explique par l’existence d’un blocage conceptuel. Certains pays promeuvent dans leur Contributions Nationalement Déterminées (NDC), c’est-à-dire dans leur plan pour abaisser leurs émissions de carbone, différents concepts d’agriculture. Leur refus d’inscrire la notion d’agroécologie ne s’explique pas par une désapprobation de la notion en elle-même, mais est la cause de craintes. Ils considèrent que le fait d’insérer cette notion pourrait in fine restreindre leur accès à des financements. De plus, ils redoutent que l’investissement dans ce mode d’agriculture ne soit que temporaire et que dans quelques années, ce concept ne soit plus porté au niveau international.
Pour aller plus loin :
- « Décryptage COP26 – Article 6 », INFCC Compensation carbone.
- BLAISE Mao, « Puits de carbone », Géo, 08/07/2009.
- LERIDON Margaux, “Transition agriculturelle. Sortir de l’agriculture industrielle mode d’emploi ”, Socialter, février-mars 2019, n°33.
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