Le 4 mars 2023 au Salon International de l’Agriculture, à Paris, nous organisions une table-ronde sur les enjeux de la transition alimentaire des restaurants universitaires, en présence des acteur.rice.s les plus concernés par la question. Revenons sur les échanges de cette table ronde…
Benjamin Flohic – COP1, association d’aide alimentaire étudiante
L’association COP1 constate quotidiennement l’aggravation de la précarité alimentaire étudiante lors des distributions gratuites de denrées alimentaires aux étudiants, toujours plus nombreux. Face à cette situation inquiétante, l’association prône l’assouplissement des critères d’obtention de bourse.
Favorable à la mise en place d’une Sécurité Sociale de l’Alimentation (SSA), Benjamin Flohic de COP1, exprime sa satisfaction de voir des expérimentations fleurirent sur les campus étudiants.
Sur le plan éthique et responsable, les paniers sont constitués de légumes et fruits frais et de bonne qualité et limitent les aliments trop transformés. Le défi principal de l’association reste de maintenir le principe d’égalité, c’est-à-dire des paniers distribués identiques en qualité et en quantité, tout en proposant des paniers responsables et bio.
Jalal Labsy – Restaurant universitaire CROUS Mabillon
Rappelant que la crise de la COVID-19 et l’inflation ont accentué la précarité étudiante, le CROUS souligne que la restauration collective et universitaire sert de vecteur de pédagogie à une alimentation plus durable pour les étudiants qui n’ont pas facilement accès à cette information ou cette alimentation.
La volonté des étudiants de manger plus responsables est claire : leurs 120 recettes végétariennes représentent plus d’un quart des repas consommés à Paris.
Mais le CROUS doit faire face à deux contraintes qui l’empêchent de mettre en place davantage de plats responsables :
– Les contraintes physiques pour stocker les produits frais et notamment les aliments pour les plats végétariens,
– Les contraintes économiques qui sont un frein considérable à la transition des menus. Les CROUS sont autonomes grâce aux revenus générés par la restauration universitaire et les logements universitaires. « Un repas à 3,30€/jour tient du miracle ».
Proposer des plats avec des aliments locaux et biologiques, c’est aussi penser à des politiques publiques visant à absorber des coûts supplémentaires.
Bien que très instructive, l’offre de formation à la cuisine durable n’est pas obligatoire et est uniquement proposée aux agents volontaires.
Keyvan Mostafavi – Assiettes végétales, association pour la végétalisation de la restauration collective
« À l’horizon 2050, aucun modèle alimentaire pourra nourrir toute la population si l’on n’a pas végétalisé notre alimentation et réduit la consommation de viande d’au moins 30% ».
La végétalisation est inévitable et nécessaire, défend Assiettes végétales.
Cependant, la viande est majoritairement retrouvée dans les assiettes des populations défavorisées. L’enjeu premier est d’augmenter la part de végétaux dans les assiettes à moindre coût. Le plus grand levier de la transition des restaurants collectifs est de rendre le repas végétarien moins cher.
Louis Sibille – Nona, outil de gestion de restauration collective durable
Nona accompagne actuellement 300 cuisiniers de restauration collective et est témoin des enjeux de la transition de manière quotidienne. La start-up œuvre pour un label spécifique valorisant le « fait-maison » dans le but d’inciter à consommer local et frais.
Revenant sur la loi Egalim de 2018, Nona souligne les 5 objectifs principaux de cette loi :
1) Proposer au moins 50 % de produits de qualité et durables, dont au moins 20 % de produits biologiques,
2) Diversifier les protéines et proposer un menu végétarien quotidien,
3) Lutter contre le gaspillage alimentaire avec notamment des dons aux associations
4) Diminuer l’utilisation du plastique avec l’interdiction d’ustensiles, de bouteilles d’eau, et de contenants alimentaires
5) Informer les parents du plan nutritionnel
« Preuve que la loi est un vrai moteur de changement, grâce à la loi Egalim, la restauration collective a engagé une petite révolution ! »
Échange avec le public
Keyvan Mostafavi, Assiettes végétales
Le CROUS de Grenoble a fait l’objet d’une expérimentation intéressante : un bilan carbone de chaque place occupée au sein de la cantine, calculé par une association du campus, et affichée quotidiennement sur des écrans de la cantine. Une initiative parlante pour se rendre compte de l’impact de notre alimentation. La signalétique explicite sur les plats végétariens, pour mieux les identifier, sera déjà un progrès, le bilan carbone est un pas supplémentaire.
Précarité alimentaire étudiante : pour une action publique forte et créative !
Le livret Des Jeunes qui mangent bien ? Pistes pour une alimentation durable sur nos campus, vise à approfondir les pistes existantes, en créer de nouvelles et continuer à mettre l’alimentation durable au cœur des discours écologiques et sociaux. La transition alimentaire, processus entamé par la loi Égalim, comporte aujourd’hui de multiples enjeux et se heurte à diverses contraintes.
Garantir l’accessibilité à l’alimentation, améliorer la qualité des plats proposés par la restauration collective et assurer la démocratie alimentaire permettront à tou.te.s de se nourrir sainement et durablement à moins coût.
Déclic, Sillage, RESES défendent ces objectifs et propositions afin qu’ils soient inscrits dans la loi et ainsi garantir une transition alimentaire juste pour la jeunesse.
Article rédigé par Déclic