Les Déchets d’Équipements Électriques et Électroniques : un poison pour l’environnement

Le réveil sonne, on checke nos notifications sur notre téléphone, une nouvelle journée commence. On enclenche la bouilloire ou la machine à café, ainsi que le grille-pain pour notre petit déjeuner. On lance une machine et il est déjà l’heure d’aller en cours ou travailler. Sur la route, on connecte nos écouteurs sans fil. 
Notre vie s’organise autour d’appareils électroniques, dont nous faisons une consommation effrénée. Presque aussitôt acheté, le produit est déjà dépassé. Surconsommation, obsolescence programmée, nous utilisons nos appareils électroniques de moins en moins longtemps et les déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) sont de plus en plus nombreux. 

Fin de vie difficile pour nos équipements électriques et électroniques

Les DEEE, ce sont les petits équipements électroniques (rasoirs, appareils photo, ordinateurs, ventilateurs, smartphones), mais aussi les appareils électroménagers (lave-linge, réfrigérateurs…) dont on se sépare pour en acheter de nouveaux (parfois alors que ces appareils fonctionnent encore).

Les DEEE finissent au mieux collectés et recyclés et au pire dans les ordures ménagères ou dans les tiroirs. 

Régulièrement remplacés, pas assez recyclés, les appareils électroniques ou électriques constituent la première source de déchets au monde. En effet, les équipements électriques et électroniques représentent plus de 50 millions de tonnes de déchets dans le monde aujourd’hui… 

Une masse qui grandit chaque année et dont l’impact social et environnemental est catastrophique, faute de solutions performantes de recyclage ou de réparation. Pour 2021, il atteint 57 millions de tonnes. C’est plus que le poids de la Grande muraille de Chine, qui est la construction humaine la plus lourde sur la planète. Dans la direction actuelle, les experts du WEEE Forum estiment qu’en 2030, ils dépasseront même les 70 millions de tonnes. 

Cette progression colossale s’explique par la hausse continue de la consommation dans ce domaine (+3 % par an). En un an, un.e français.e produit 21kg de déchets d’équipements électriques et électroniques. Une moyenne bien supérieure à la moyenne mondiale, qui atteint 7,3 kilos.

Améliorer le recyclage des DEEE en Europe afin de limiter leur impact environnemental et social

Autant de déchets représentent un coût environnemental et social non négligeable. Lorsqu’ils ne sont pas collectés, ces équipements s’accumulent dans l’environnement, causant une pollution considérable.

L’ONG Basel Action Network (BAN) dans son enquête  – Holes in the Circular Economy : WEEE Leakage from Europe (PDF), estime que l’Europe exporte illégalement, au regard du droit européen, 352 474 tonnes de déchets électroniques par an. Sans compter les exports « légaux » pour réemploi mais qui ne sont pas exempts de risque…

Aux États-Unis, on estime que ce sont 50 à 80% des déchets collectés pour le recyclage qui sont exportés en Chine, en Inde ou en Afrique. Pour ce pays n’ayant pas ratifié la Convention de Bâle, cette pratique est légale. 

Les déchets terminent leur vie dans des immenses décharges à ciel ouvert, comme celle d’Agbogbloshie, au Ghana où des enfants sont chargés de brûler le matériel pour en récupérer les matières premières. La capitale indienne est, elle, en train de devenir le principal dépotoir de déchets électroniques dans le monde. Il y aurait 8.500 téléphones, 5.500 téléviseurs et 3.000 ordinateurs démontés chaque jour à Delhi.

Les conditions de « recyclage », sont une grave menace pour la santé des êtres humains qui vivent ou travaillent à proximité de ces décharges et pour l’écosystème, avec notamment l’accumulation de métaux lourds dans le sol. L’exposition au mercure, présent dans les écrans d’ordinateur comme dans les éclairages fluorescents, peut notamment provoquer des lésions cérébrales.

Lorsque les équipements sont recyclés, le taux de recyclage des DEEE oscille entre 74 % et 86 %.

Source : Ecosystem

Les métaux comme l’or, l’argent, le cuivre, le cobalt, le lithium, le néodyme, l’indium, le gallium sont souvent présents en faibles quantités dans ces déchets. Même s’ils pèsent peu sur le taux de recyclage, ce sont malheureusement les éléments les plus difficilement récupérables. Le recyclage joue alors un rôle très important dans la préservation de ces matières stratégiques qui ont un risque élevé de pénurie d’approvisionnement. Tout l’enjeu pour l’Europe est donc de travailler sur leur recyclabilité

Outre la préservation des ressources, recycler deux tonnes de DEEE, c’est éviter au moins 2 tonnes d’émission de CO2, soit environ la consommation annuelle en énergie d’un.e Français.e. Pour le recyclage des téléphones, c’est facilement 2 ou 3 fois de tonne d’émission de CO2 évitée. 

Conclusion, le recyclage des DEEE est important car il permet de  :

  • préserver la santé humaine,
  • ne plus puiser dans les ressources naturelles,
  • produire en consommant moins d’énergie,
  • émettre moins de gaz à effet de serre,
  • limiter la pollution générée par ses composants toxiques (batterie).

Recyclage des DEEE : un comportement pas systématique

Pour que les DEEE soient recyclés, encore faut-il les déposer dans des collectes de recyclage ! On estime entre 54 et 113 millions  le nombre de smartphones qui dorment actuellement dans les tiroirs des français.e.s ! La France s’est donnée l’objectif de diviser par 2 ce stock en 5 ans.

Plusieurs études tendent à montrer que les jeunes ont tendance à garder leurs anciens portables à cause de la facilité du comportement par défaut, d’un manque d’informations sur les alternatives au stockage, d’une crainte d’exploitation d’informations personnelles ou encore à cause de l’attachement à l’objet. 

Nous avons écrit un article sur ces comportements ICI

Pour autant, la progression du marché des appareils reconditionnés, estimé à 80 milliards de dollars, est un signal positif à garder en tête !

La responsabilité des entreprises 

Les consommateur.trice.s ne sont pas seul.e.s responsables de la pollution des DEEE. 

Nombreuses sont les associations de défense de l’environnement qui réclament notamment plus de responsabilité de la part des entreprises sur leurs produits afin de réduire au maximum leur impact sur la planète. Les entreprises peuvent, entre autres, allonger la durée de vie de leurs objets, proposer des pièces de remplacement sur un temps plus long, collecter et recycler au maximum les composants de leurs appareils.

Depuis le 15 novembre, grâce à la loi sur l’empreinte environnementale du numérique, l’Etat renforce la responsabilisation des professionnels du secteur. Cette loi prévoit notamment de limiter le renouvellement des appareils numériques en : 

  • rendant plus opérationnel le délit d’obsolescence programmée ;
  • renforçant la lutte contre l’obsolescence logicielle ;
  • interdisant aux fabricants de rendre impossible la restauration de l’ensemble des fonctionnalités d’un terminal réparé ou reconditionné ;
  • interdisant les techniques empêchant le consommateur d’installer les logiciels ou les systèmes d’exploitation de son choix sur son appareil au bout d’un délai de deux ans.
  • mettant fin à l’obligation de fournir des écouteurs lors de l’achat de smartphone
  • envisageant des objectifs contraignants de recyclage, de réemploi et de réparation spécifiques pour certains biens numériques.

Si les décrets qui suivent permettent la bonne application de cette loi, elle pourrait contribuer à ce que, au moins en France, les efforts combinés des consommateurs et des entreprises permettent de lutter contre cette hausse des déchets digitaux.

Quelques pistes pour agir à son échelle 

En tant que consommateur.trcie.s, voici quelques façons d’agir concrètement :

  • Utilise ton smartphone aussi longtemps que possible et ménage en particulier la batterie.
  • Répare tes appareils, plutôt que de les changer. 
  • Si ton appareil fonctionne encore très bien, ne le revend pas pour en acheter un nouveau. 
  • Au lieu de choisir un appareil tout neuf, privilégie l’occasion. Cela évite d’extraire des nouveaux matériaux, cela émet moins de CO2 et cela coûte moins cher ! 
  • Si tu dois acheter neuf, choisis des marques qui utilisent des produits recyclés ou qui proposent un programme de recyclage et reprennent les vieux appareils.
  • Fais le tri dans tes tiroirs et donne tes vieux appareils à des associations ou des entreprises qui les récupèrent pour les recycler ou les réparer.

Cet article vous a plu ?

On revient prochainement avec un article sur l’empreinte du numérique ! Mais en attendant, vous pouvez consulter nos articles “Les data centers, un gouffre énergétique ?” et « Smartphone, recyclage et environnement : un triangle amoureux compliqué« 

Liens utiles : 

Sites de seconde main : 

Où déposer ces DEEE ? 

Autres liens : https://www.nowuproject.eu/fr/content/smartphone-casse-et-apres 

Sources : 

Article rédigé par Clémentine Mevel