La société civile à la COP : quelle place pour quelle influence ?

La COP est un endroit de rencontres et de partages, où il est parfois difficile de se rendre compte des rôles de chacun.e. Voici un petit décryptage de celui de la société civile.

 

 

La différence entre les Parties et la société civile à la COP

Une accréditation à la COP donne accès à différents badges, en fonction de l’organe qui l’obtient. La société civile possède des badges “observateurs”, qui sont jaunes, tandis que, par exemple, les Parties[1] possèdent des badges roses (ou rouges pour les chef.fe.s de délégation). En fonction de ces badges, l’accès aux différentes réunions est plus ou moins restreint durant les deux semaines de la COP. En tant qu’association, le REFEDD s’est donc vu attribuer des badges jaunes. Cela signifie qu’il est impossible pour nous de participer aux négociations : nous pouvons y assister mais non y intervenir.

Notre influence sur les débats est donc de facto limitée. Cependant, notre rôle ne s’arrête pas à la simple observation. En effet, en observant nous pouvons communiquer, et en communiquant, nous pouvons dénoncer. En tant que représentant.e.s de la société civile au sein d’une rencontre internationale de cette envergure, cela est particulièrement important.

 

Pour illustrer cette différence, l’exemple du sujet Océans

Cette différence d’accès et d’influence peut créer un certain fossé entre le travail de la société civile et celui des négociateur.trice.s. Le traitement du sujet des océans illustre très concrètement ces disparités : si la COP 25 est surnommée la “Blue COP”, les océans ne font pas partie des sujets de négociations. Il n’existe pas de réunions officielles entre les Parties, qui pourraient aboutir à des décisions et engagements, pourtant primordiaux.

Pour autant, la constituante YOUNGO[2] dispose bel et bien d’un groupe de travail concernant les océans. Le but est de se positionner sur les différents side events[3] les concernant pendant la COP, afin que nous puissions rencontrer des expert.e.s mais aussi intervenir et exprimer nos attentes et/ou nos craintes sur le non-positionnement des Parties sur ce sujet central.

Durant la COY 15[4], le groupe de travail sur les océans avait même envoyé un rapport au Secrétariat de la CCNUCC, afin qu’il soit lu pendant la séance de clôture, ce qui se fait habituellement. Il s’avère que le Secrétariat n’a même pas lu ce rapport, qui résultait pourtant de nombreuses heures de travail et de débats afin d’arriver à une position commune et pertinente.

 

 

 

À quoi bon avoir des observateur.trice.s à la COP?

Au sein de la COP sont rassemblés un nombre de connaissances et de savoirs impressionnants, monde dans lequel des milliers d’acteurs interagissent quotidiennement, via différentes plateformes. Lors des réunions de travail YOUNGO, il est parfois compliqué de cerner la portée voire le sens de notre production : pourquoi prendre du temps pour écrire une publication, qui sera simplement mise aux archives de la COP, sans avoir jamais été lue ? Dans la délégation, nous étions donc assez mitigé.e.s, après nos premières réunions.

 

Mais finalement, si nous ne le faisons pas, qui le fera ?

Ce qui est sûr, c’est qu’il en faudra plus pour décourager la société civile, qui regorge de créativité et de volonté pour partager ce qu’il se passe à la COP mais aussi tenter, au maximum, de faire entendre sa voix, en marge des négociations. Par exemple, tous les jours à 18h, le Climate Action Network[5] organise une cérémonie pour élire le “Fossil of the Day”. Il s’agit d’un prix décerné au pays ayant fait de son mieux pour faire le moins possible et bloquer les négociations. C’est une très mauvaise presse pour le pays « vainqueur », mettant sous pression les Parties, qui essayent donc de ne pas l’être et qui réagissent lorsqu’ils sont nommés.

Ce bel exemple d’une société civile à l’influence directe sur les positionnements des Parties démontre bien le rôle crucial que peut avoir la communication. Au-delà de pousser pour plus de responsabilité, les observateur.trice.s permettent aussi de mettre en avant le double-discours de certains pays. Si on peut parfois se sentir démuni face à la technicité des négociations et à notre impossibilité d’y prendre part, il existe bien d’autres moyens de se faire entendre.

 

Article rédigé par Eloïse Lehmann, observatrice à la COP25 pour le REFEDD.

 

Notes :

[1] Les Parties sont les pays signataires de la Convention Climat des Nations Unies pour le Changement Climatique de 1992.
[2] Youth Non Governmental Organisation : c’est la constituante dans laquelle se trouve le REFEDD, qui rassemble l’ensemble des ONG jeunes de la COP.
[3] Les sides events sont les événements officiels organisés en parallèle des négociations, souvent des conférences sur des thématiques précises, rassemblant aussi bien des politiques, des experts, des membres de la société civile, …
[4] La COY est la Conference of Youth, qui se déroule durant trois jours juste avant la COP. Elle rassemble l’ensemble des jeunes, leur permettant de se rencontrer et de commencer le travail sur les différentes thématiques qui seront abordées pendant la COP.
[5] un réseau mondial d’ONGs travaillant pour promouvoir les actions individuelles et gouvernementales visant à limiter le changement climatique induit par l’Homme à des niveaux écologiquement durables